Paul Éluard–Man Ray : FACILE
Première double page
Tu te lèves l’eau se déplie
Tu te couches l’eau s’épanouit
Tu es l’eau détournée de ses abîmes
Tu es la terre qui prend racine
Et sur laquelle tout s’établit
Tu fais des bulles de silence dans le désert des bruits
Tu chantes des hymnes nocturnes
sur les cordes de l’arc-en-ciel
Tu es partout tu abolis toutes les routes
Tu sacrifies le temps
A l’éternelle jeunesse de la flamme exacte
Que voile la nature en la reproduisant
Femme tu mets au monde un corps toujours pareil
Le tien
Tu es la ressemblance
Deuxième double page
L’ENTENTE
I
Au centre de la ville la tête prise dans le vide d’une place
Ne sachant pas ce qui t’arrête ô toi plus forte qu’une statue
Tu donnes à la solitude un premier gage
Mais c’est pour mieux la renier
T’es-tu déjà prise par la main
As-tu déjà touché tes mains
Elles sont petites et douces
Ce sont les mains de toutes les femmes
Et les mains des hommes leur vont comme un gant
Les mains touchent aux mêmes choses
Troisième double page
Écoute-toi parler tu parles pour les autres
Et si tu te réponds ce sont les autres qui t’entendent
Sous le soleil au haut du ciel qui te délivre de ton
ombre
Tu prends la place de chacun et ta réalité est infinie
Multiple tes yeux divers et confondus
Font fleurir les miroirs
Les couvrent de rosée de givre de plollen
Les miroirs spontanés où les aubes voyagent
Où les horizons s’associent
Le creux de ton corps cueille des avalanches
Car tu bois au soleil
Tu dissous le rythme majeur
Tu le redonnes au monde
Tu enveloppes l’homme
Toujours en train de rire
Mon petit feu charnel
Toujours prête à chanter
Ma double lèvre en flamme
Les chemins tendres que trace ton sang clair
Joignent les créatures
C’est de la mousse qui recouvre le désert
Sans que la nuit jamais puisse y laisser d’emprintes ni
d’ornières
Belle à dormir partout à rêver rencontrée à chaque
instant d’air pur
Aussi bien sur la terre que parmi les fruits des bras des
jambes de la tête
Belle à désirs renouvelés tout est nouveau tout est futur
Mains qui s’étreignent ne pèsent rien
Entre des yeux qui se regardent la lumière déborde
L’écho le plus lointain rebondit entre nous
Tranquille sève nue
Nous passons à travers nos semblalbles
Sans nous perdre
Sur cette place absurde tu n’es pas plus seule
Qu’une feuille dans un arbre qu’un oiseau dans les airs
Qu’un trésor délivré.
II
Ou bien rire ensemble dans les rues
Chaque pas plus léger plus rapide
Nous sommes deux à ne plus compter sur la sagesse
Quatrième double page
Avoue le ciel n’est pas sérieux
Ce matin n’est qu’un jeu sur ta bouche de joie
Le soleil se prend dans sa toile
Nous conduisons l’eau pure et toute perfection
Vers l’éta diluvien
Sur une mer qui a la forme et la couleur de ton corps
Ravie de ses tempêtes qui lui font robe neuve
Capricieuse et chaude
Changeante comme moi
Ô mes raisons le loir en a plus de dormir
Que moi d’en découvrir
de valables à la vie
A moins d’aimer
En passe de devenir caresses
Tes rires et tes gestes règlent mon allure
Poliraient les pavés
Et je ris avec toi et je te crois toute seule
Tout le temps d’une rue qui n’en finit pas.
A LA FIN DE L’ANNEE. DE JOUR EN
JOUR PLUS BAS. IL ENFOUIT SA
CHALEUR COMME UNE GRAINE.
I
Nous avançons toujours
Un fleuve plus épais qu’une grasse prairie
Nous vivons d’un seul jet
Nous sommes du bon port
Le bois qui va sur l’eau l’arbre qui file droit
Tout marché de raison bâclé conclu s’oublie
Où nous arrêterons-nous
Notre poids immobile creuse notre chemin
Cinquième double page
Au loin les fleurs fan
ées des vacances d’autrui
Un rien de paysage suffisant
Les prisons de la liberté s’effacent
Nous avons à jamais
Laissé derrière nous l’espoir qui se consume
Dans une ville pétrie de chair et de misère
De tyrannie
La paupière du soleil s’abaisse sur ton visage
Un rideau doux comme ta peau
Une aile salubre une végétation
Plus transparente que la lune du matin
Nos baisers et nos mains au niveau de nous-mêmes
Tout au-delà ruiné
La jeunesse en amande se dénude et rêve
L’herbe se relève en sourdine
Sur d’innocentes nappes de petite terre
Premier dernière ardoise et craie
Fer et rouille seul à seule
Enlacés au rayon debout
Qui va comme un aveu
Écorce et source redressée
L’un à l’autre dans le présent
Toute brume chassée
Deux autour de leur ardeur
Joints par des lieues et des années
Notre ombre n’éteint pas le feu
Nous nous perpétuons.
II
Au-dessous des sommets
Nos yeux ferment les fenêtres
Nous ne craignons pas la paix de l’hiver
Les quatre murs éteints par notre intimité
Quatre murs sur la terre
Le plancher le plafond
Sont des cibles faciles et rompues
A ton image alerte que j’ai dispersée
Et qui m’est toujours revenue
Un monotone abri
Un décor de partout
Mais c’est ici qu’en ce moment
Commencent et finissent nos voyages
Les meilleures folies
C’est ici que nous défendons notre vie
Que nous cherchons le monde
Un pic écervelé aux nuages fuyants au sourire éternel
Dans leurs cages les lacs au fond des trous la pluie
Le vent sa longue langue et
les anneaux de la fraîcheur
La verdure et la chair des femmes au printemps
La plus belle est un baume elle incline au repos
Dans des jardins tout neufs amortis d’ombres tendres
Leur mère est une feuille
Luisante et nue comme un linge mouillé
Sixième double page
Les plaines et les toits de neige et les tropiques
luxueux
Les façons d’être du ciel changeant
Au fil des chevelures
Et toujours un seul couple uni par un seul vêtement
Par le même désir
Couché aux pieds de son reflet
Un couple illimité.
FACILE EST BIEN
Facile est beau sous tes paupières
Comme l’assemblée du plaisir
Danse et la suite
J’ai dit la fièvre
Le meilleur argument du feu
Que tu sois pâle et lumineuse
Mille attitudes profitables
Mille étreintes défaites
Répétées vont s’effaçant
Tu t’obscurcis tu te dévoiles
Un masque tu l’apprivoises
Il te ressemble vivement
Et tu n’en parais que mieux nue
Nue dans l’ombre et nue éblouie
Comme un ciel frissonnant d’éclairs
Tu te livres à toi-même
Pour te livrer aux autres.
Septième double page
Nous avons fait la nuit je tiens ta main je veille
Je te soutiens de toutes mes forces
Je grave sur un roc l’étoile de tes forces
Sillons profonds où la bonté de ton corps germera
Je me répète ta voix cachée ta voix publique
Je ris encore de l’orgueilleuse
Que tu traites comme une mendiante
Des fous que tu respectes des simples où tu te baignes
Et dans ma tête qui se met doucemen
t d’accord avec la tienne avec la nuit
Je m’émerveille de l’inconnue que tu deviens
Une inconnue semblable à toi semblable à tout ce que j’aime
Qui est toujours nouveau
Υ.Γ. Ενα διαδικτυακόνν δώροννν για όσους αγαπάνε την ποίηση...
Ενα « photopoème » σπάνιο...
που κατάφερα με πολύ κόπο να μαζέψω από διάφορες σελίδες...
Νομίζω όμως πως το αξίζει....
Δεν σας δίνω μετάφραση γιατί όσες διάβασα έχαναν όλη τη μαγεία...
Αν πρέπει να κάνετε το έγκλημα...
υπάρχουν αρκετές μεταφράσεις...
με πιο διάσημη αυτήν της Μάτση Χατζηλαζάρου...
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